Les malentendus de l'élargissement

Publié le par SDJ 30

medium_eu-rm-bg.jpgL'entrée dans l'Union européenne de la Roumanie et de la Bulgarie, le 1er janvier, s'est faite de façon beaucoup plus discrète que le précédent élargissement de mai 2004. Il est vrai que les nouveaux arrivants n'ont pas le même poids démographique et économique que leurs prédécesseurs. Mais ce manque d'enthousiasme est aussi le symptôme d'un malaise plus général. On l'a vu à l'ouest avec le blocage du traité constitutionnel en 2005. On le voit à l'est avec la montée des populismes et du sentiment anti-européen, comme avec l'éloignement indéfini des perspectives d'adoption de l'euro. Les pays ex-communistes ne peuvent que se féliciter de leur croissance rapide, mais ils constatent aussi l'écart qui les sépare de leurs partenaires occidentaux sur le sens même de la construction européenne.

A l'ouest, l'idée européenne a pris corps en réaction aux conflits ravageurs de la première moitié du XXe siècle : il fallait assurer la paix entre les anciens belligérants en les liant par des intérêts communs. Les considérations de sécurité face à la menace soviétique ont joué, sans être déterminantes : les deux puissances nucléaires (France et Grande-Bretagne) n'ayant pas vocation à sanctuariser l'ensemble du territoire de la Communauté, celle-ci s'en remettait au « parapluie » américain. Les pays d'Europe centrale et orientale, eux, n'ont pas les mêmes références historiques. La Première Guerre mondiale a été pour la plupart d'entre eux l'occasion d'échapper à la domination des empires continentaux (Autriche, Allemagne, Russie), et de conquérir ou de recouvrer leur indépendance, voire leur existence en tant qu'Etats. Leur grande catastrophe du XXe siècle a été de tomber après 1945 sous l'emprise soviétique, et ils considèrent toujours la Russie comme leur principale menace. D'où la priorité qu'ils accordent à l'Otan et leur attachement aux Etats-Unis. D'où, aussi, la colère de la Pologne et des Etats baltes au sujet du gazoduc russo-allemand, dont le tracé contourne leurs territoires alors qu'ils dépendent largement de la Russie pour leur approvisionnement énergétique.

medium_161411.jpgCe malentendu historique en engendre un autre, sur la conception même du « vivre ensemble ». A l'ouest, la construction européenne s'est traduite par l'adoption de règles communes et la création du grand marché, dont chaque pays profitait, les aides régionales ou sectorielles ne faisant qu'accélérer la convergence des niveaux de vie dans une perspective, floue mais réelle, d'union politique. Pour les pays d'Europe de l'Est, l'union politique est, au mieux, un objectif secondaire, la convergence économique est prioritaire. Et les aides communautaires doivent être d'autant plus substantielles qu'elles sont la compensation d'années de dépendance et de stagnation, pour des nations injustement « abandonnées » à la griffe soviétique.

Angela Merkel veut relancer, au cours de la présidence allemande de l'Union, la ratification du Traité constitutionnel. Ce sera peut-être l'occasion de s'expliquer sur la façon dont on conçoit, à l'est et à l'ouest, la vocation de l'Europe.
 
Les Echos 

Publié dans Europe

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B
surtout que durant les 5 siecles précedants la première guerre mondiale un certain nombre de pays balkaniques dont la bulgarie étaient sous domination ottamane<br /> je ne comprends pas cete façon d'occulter l'histoire mais si je sais c'est la candidature de la Turquie qui gêne .....
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